La légitimité démocratique d’un élu, notamment, le Président de la République, se fonde sur des élections, d’abord, libres, et ensuite, intègres. La liberté d’une élection est l’expression du choix des électeurs sans restrictions et sans aucun obstacle à la pleine participation des candidats. Quant à l’intégrité, elle est la garantie du suffrage universel, du secret du vote, et enfin d’un système électoral qui produit des résultats qui reflètent la pleine expression de la volonté du peuple. Pour évaluer la liberté et l’intégrité d’une élection, trois (3) méthodes d’évaluation des élections sont en général utilisées : D’après les résultats, ou d’après le processus électoral, ou encore d’après le droit public international. Afin d’évaluer la liberté et l’honnêteté de l’élection présidentielle de 2024, l’approche guidée par l’analyse du cadre législatif et réglementaire en rapport avec le droit international, le processus électoral et les résultats est adoptée. À cette fin, nous abordons la question de recherche suivante : Quelle est la liberté et l’intégrité de la présidentielle de 2024, à la lumière du « Gerrymandering » de la carte électorale ? L’objectif est d’évaluer, d’une part, la liberté de l’élection, et d’autre part, son intégrité. En définitive, il sera déterminé la légitimité démocratique du Président élu. Afin de pouvoir répondre à notre question de recherche, l’étude de cas guidée par le réalisme critique constitue notre méthode de recherche. Et, nous avons choisi le bureau de vote comme unité de référence de l’enquête électorale afin de pouvoir collecter des données, notamment, les résultats définitifs bureau de vote par bureau de vote de l’élection présidentielle du 24 mars 2024. Nous avons entrepris de faire une recherche documentaire sur les résultats définitifs par bureau de vote de l’élection présidentielle de 2024 par une recherche sur Internet, le 26 août 2024, en utilisant les moteurs de recherche généraliste (Google, Bing, DuckDuckGo ). Elle n’a retourné aucun résultat sur la publication par le Président du Conseil Constitutionnel des résultats définitifs par bureau de vote. Il en est de même de celle effectuée directement sur le site web du Conseil Constitutionnel. Ce dernier ne dispose pas d’un moteur de recherche pour faire une recherche avancée. Nous en tirons donc la conclusion que les résultats définitifs par bureau de vote n’ont pas été publiés sur Internet. Malgré les résultats infructueux, nous avons poursuivi la recherche en nous adressant directement à l’Imprimerie nationale qui devrait assurer la publication des résultats définitifs. Nos demandes verbales, pour avoir des copies des éditions dans lesquels les résultats par bureau de vote sont publiés, ont été aussi sans résultats positifs. Finalement, nous avons adressé à la Direction de l’Imprimerie nationale une lettre, le 6 juin 2024, pour demander des éditions du Journal Officiel dans lesquels les résultats définitifs ont été publiés. Plus de trois (3) mois après, nous n’avons pas encore reçu de réponses. Nous avons continué nos recherches en saisissant le Président du Conseil Constitutionnel d’une lettre de demande d’informations, en date du 23 juillet 2024. Nous avons sollicité d’obtenir du juge électoral, en application de l’article 8 de la Constitution sur le droit à l’information plurielle et des articles LO.143 et LO.192 du code électoral, la communication des références des Journaux officiels dans lesquels sont publiés les résultats définitifs bureau de vote par bureau de vote des élections ci-après : Élection présidentielle du 24 février 2019 ; Élections législatives du 31 juillet 2022 ; Élection présidentielle du 24 mars 2024.
Enfin, nous avons aussi demandé au Président du Conseil Constitutionnel la communication des adresses des publications sur internet de ces résultats et plus précisément les liens d’accès direct ou à défaut de tout autre moyen de communication utilisé. Il est à rappeler, qu’autant les candidats à une élection nationale peuvent saisir le Conseil Constitutionnel en cas de non-respect de leurs droits, autant, les électeurs qui allèguent de la violation de leurs dans le processus électoral, peuvent aussi saisir le Conseil Constitutionnel. En l’espèce, c’est le droit de tout électeur à une information plurielle, garanti par l’article 8 de la constitution qui lésé. Aussi, nous avons joint à cette lettre une copie de notre carte d’identité et d’électeur pour attester de notre qualité à pouvoir saisir le juge électoral. À défaut d’avoir communication des informations demandées, l’objectif implicite de cette lettre adressée au Président du Conseil Constitutionnel, était de savoir les motifs qu’il pourrait invoquer pour justifier la non publication des résultats définitifs par bureau de vote. Et, plus de deux (2) mois après notre saisine, nous n’avons pas encore reçu de réponses du Président du Conseil Constitutionnel. Compte tenu de ce qui précède, il nous échet de conclure que les résultats définitifs bureau de vote par bureau de vote, de l’élection présidentielle du 24 février 2019, des élections législatives du 31 juillet 2022 et de l’élection présidentielle du 24 mars 2024, n’ont été publiés, ni au Journal Officiel, ni sur Internet, conformément aux dispositions des articles LO.143 et LO.192 du Code électoral. Toutefois, les résultats de cette recherche documentaire ont été deux (2) documents que nous avons pu télécharger d’Internet. Le premier document est la décision n° 7/E/2024 de la séance du 29 mars 2024 du Conseil Constitutionnel proclamant les résultats définitifs agrégés au niveau national. Et le second concerne les mêmes résultats définitifs par bureau de vote mais agrégés au niveau départemental. Enfin, il est à remarquer que nous n’avons pas constaté la publication de ces documents sur le site web du Conseil Constitutionnel (Consulté, le 26 août 2024). A la lumière des résultats de notre recherche documentaire, il nous échet de conclure que les résultats définitifs bureau de vote par bureau de vote de l’élection présidentielle du 24 mars 2024, n’ont été publiés, ni au Journal Officiel, ni sur Internet, par le Président du Conseil Constitutionnel conformément aux dispositions des articles LO.143 et LO.192 du Code électoral. Les résultats définitifs par bureau de vote constituent la seule source de données électorales solide, exhaustive et fiable, pour être en mesure de vérifier nos hypothèses de recherche. En effet, en l’absence de ces derniers, il n’est possible de faire une triangulation afin de corroborer les résultats publiés, d’identifier l’impact du charcutage électoral sur la participation, l’abstention, l’existence de bureaux de vote fictifs et la fabrication de procès-verbaux de résultats fictifs, ainsi que la capacité des candidats à se faire représenter dans tous les bureaux de vote afin d’observer le déroulement du scrutin. Néanmoins, Il ressort des résultats définitifs proclamés par le Conseil Constitutionnel, que 2 852 637 électeurs inscrits n’ont pas voté le 24 mars 2024. Ce chiffre est une corroboration de notre prévision d’août 2023, soit huit (8) mois avant le scrutin, d’au moins 2 000 000 d’électeurs inscrits risquaient d’être privés de vote. Mais aussi, de notre hypothèse un nombre de 2 359 587 électeurs inscrits qui risquaient d’être privés de vote. Seulement, le manque de données électorales par bureau de vote ne permet pas d’identifier les ressorts de cette absentéisme et ainsi vérifier nos hypothèses. En outre, il n’est pas vérifié que ces électeurs qui n’ont pas voté sont des individus qui existent réellement. Notre analyse des listes électorales a démontré que le fichier électoral du Sénégal n’est ni fiable, ni sincère, avec plus d’1 500 000 inscriptions illégales. Enfin, sur un nombre d’électeurs de 9 540 334, il n’y a que 7 371 890 qui sont inscrits sur les listes électorales. Aussi, 2 168 444 électeurs ne sont pas inscrits suite à des restrictions à l’étape de la révision des listes électorales, pendant la période pré-électorale du processus électoral. Et finalement, 5 021 081 électeurs n’ont pas participé à l’élection présidentielle du 24 mars 2024. La liberté d’une élection est l’expression du choix des électeurs sans restrictions. À ce titre, au vu des obstacles constatés qui ont empêchés la participation et le vote de plus de 5 millions d’électeurs, l’élection présidentielle du 24 mars 2024 ne peut être considérée comme libre. L’intégrité d’une élection est fondée sur la garantie du suffrage universel direct, égal et du secret du vote, et aussi, d’un système électoral qui produit des résultats qui reflètent la pleine expression de la volonté du Peuple. Ces deux principes guident notre analyse d’évaluation de l’intégrité de l’élection présidentielle du 24 mars 2024. Premièrement, il résulte de nos investigations que le suffrage universel n’a pas été garanti pour tous les électeurs car plus de 5 millions d’électeurs ont été privés de vote. Deuxièmement, le système électoral permet de designer un Président élu qui n’a pas obtenu la majorité absolue des électeurs. En l’espèce, 2 434 751 suffrages sur 7 371 890 électeurs inscrits, de 9 540 334 électeurs. Il échet donc de conclure que l’élection présidentielle du 24 mars 2024 n’a pas été intègre. L’évaluation de l’élection présidentielle du 24 mars 2024 a démontré qu’elle n’a été ni libre, ni intègre. Le Président élu est légal mais il n’a pas de légitimité démocratique. Elle a été donc entaché par le système électoral en vigueur. En effet, ce résultat découle du système électoral qui ne garantit pas la légitimité démocratique des représentants du Peuple. Il est ainsi crucial, afin de consolider la démocratie au Sénégal, de procéder à la réforme du cadre légal, réglementaire et institutionnel du processus électoral et du système électoral. À cet effet, des concertations nationales sont souhaitables. Elle est l'occasion pour les parties prenantes d’apprécier l’élection et de proposer les réformes nécessaires. Sur le plan législatif, il n’y avait pas obstacles avérés à la modification du Code électoral par des projets et propositions de loi. Invoquer l’absence de coopération de la majorité parlementaire, ne saurait convaincre, sans la mettre à l’épreuve sur des reformes qui visent à renforcer la crédibilité des élections. Au-delà des dispositions à modifier par voie législative, il y a celles qui peuvent être précisées immédiatement par voie réglementaire, en modifiant le décret n° 2021-1196 abrogeant et remplaçant le décret n° 2017-170 du 27 janvier 2017 portant partie réglementaire du Code électoral. Sans être exhaustif on peut citer : La publication des résultats de la révision des listes électorales, la publication sur internet des listes électorales provisoires et définitives, l’élaboration de la carte électorale qui l’est actuellement de manière discrétionnaire par le Ministre chargé des élections, la publication de la carte électorale sur internet, le plan de ramassage des procès-verbaux des bureaux de vote, la publication en temps réel des résultats des bureaux de vote sur internet, etc. etc. En sus, il est à noter que dans le décret n° 2021-1196 du 21 septembre 2021 portant partie réglementaire du Code électoral, il n’y a aucune disposition sur la dernière étape du processus électoral se rapportant au recensement des votes, la proclamation des résultats provisoires et définitifs et enfin leur publication. Il est donc impératif et urgent d’apporter des précisions, notamment, sur le délai de publication des résultats définitifs bureau de vote par bureau de vote, au journal officiel, sur internet, en précisant dans quels sites web ils doivent être obligatoirement publiés. Enfin, une révision constitutionnelle ou une nouvelle Constitution est une nécessité absolue. À cette occasion, les articles 26,33, 64, etc. sont, particulièrement, à modifier pour d’une part, conférer aux représentants du Peuple la légitimité démocratique, et d’autre part, rendre les représentants responsables devant le Peuple. L’interdiction du mandat impératif est à supprimer de la Constitution. Une disposition qui est un déni de la démocratie. L’illégalité du mandat impératif au Sénégal en 2024 questionne. Quels sont les justifications de cette règle qui date de la révolution française de 1789 ? Sur le plan institutionnel, des changements qui concourent à renforcer la liberté et l’intégrité des élections n’ont pas encore été observés. Le caractère illégal de la dernière nomination des membres de la Commission Électorale Nationale Autonome justifie l’abrogation du décret pour nommer de nouveaux membres. Ce qui n’est toujours pas fait. Enfin, la nomination d’un nouveau Directeur à la Direction Générale des Élections ne saurait constituer un changement positif. Remplacer un homme du système par un autre du système, ne saurait être un acte de rupture, plutôt de perpétuation du processus électoral caractérisé par des irrégularités et des manquements. La démocratie se construit par le dialogue et non en invoquant pour se justifier, le respect de dispositions légales et réglementaires qui ne sont jamais neutre. Publié le 22/ 09/ 2024 Malgré le constat, au sortir de l’élection présidentielle du 24 mars 2024, d’un processus électoral biaisé qui prive de vote des millions d’électeurs Sénégalais, et d’un système électorale inéquitable qui crée des majorités fictives (non conforme à la réalité), il n’a pas été observé l’amorce d’une quelconque dynamique de réformes électorales en vue des législatives du 17 novembre 2024. En effet, le dialogue promis par le Président nouvellement élu pour examiner les reformes électorales à implémenter, n’a pas encore été convoqué, plus de 6 mois après ce premier discours à la nation, qui laissait penser que la consolidation de la démocratie serait un axe prioritaire de sa gouvernance. Plutôt que de s’engager, conformément à sa promesse du 3 avril 2024, dans un dialogue inclusif pour des reformes électorales qui garantissent que la voix de chaque électeur Sénégalais compte dans le choix des représentants du peuple, nous libérant ainsi d’élections au suffrage censitaire, le nouveau Président s’est plutôt attelé avec célérité à organiser des législatives huit (8) après la présidentielle de mars 2024. À cet égard, il déclare inviter le Peuple détenteur de la souveraineté à s’exprimer, conformément aux dispositions de l’article 3 de la Constitution, pour lui demander les moyens institutionnels de gouverner. Se pose alors la question de savoir si les conditions qui permettent au peuple de s’exprimer ont été créées par des reformes qui tendent à rendre les élections plus démocratiques, suite à l’évaluation du processus électoral et du système électoral du scrutin du 24 mars 2024. Au-delà des justificatifs avancés pour dissoudre l’Assemblée Nationale, la véritable motivation est de profiter des effets des scrutins de proximité, c’est à dire, de l’agencement temporel, planifié et décidé, entre l’élection présidentielle et les élections législatives, qui produit des effets d’entraînement notoires de la présidentielle sur le scrutin législatif. En effet, les scrutins de proximité et le scrutin majoritaire à un tour ont toujours accouché systématiquement d’une large majorité parlementaire au Sénégal, et que les effets de l’introduction d’une portion congrue de proportionnelle sont minimes et sans effets. Sous cet angle, le nouveau président tirera avantage du scrutin de proximité, mais aussi, de la position qu’il occupe dans l’espace politique, faisant figure de « vainqueur de Condorcet », pour obtenir, dans quelques semaines, une large majorité parlementaire. Il apparait déjà dans une estimation des résultats des législatives du 17 novembre 2024 que la coalition politique au pouvoir, sur la base des résultats par département de l’élection présidentielle du 24 mars 2024 obtiendrait une majorité absolue à l’Assemblée nationale avec 105 députés. Il est à noter que c’est un exercice toujours fragile, qui incite à la prudence quant aux projections de résultats annoncés. Des élections législatives anticipées sont donc organisées, 8 mois après la présidentielle de 2024, sans aucune réforme du cadre légal et institutionnel, ni du système électoral, ni du processus électoral. La gouvernance des élections en vigueur depuis les législatives de 2007 est maintenue tel quel. Le scrutin du 17 novembre 2024 sera ainsi marqué par l’exclusion du vote d’au moins cinq millions d’électeurs, des députés élus par une minorité d’électeurs qui ne peuvent prétendre à la légitimité démocratique et enfin par une répartition des sièges de députés déséquilibrée produisant des inégalités de suffrages contraires à la Constitution. La répartition des sièges qui résulte du décret n° 2022-1051 du 03 mai 2022 portant répartition des sièges de députés à élire au scrutin majoritaire départemental pour les élections législatives du 31 juillet 2022 qui porte atteinte à l’égalité de suffrage est conservé intact, sans aucune modification, pour les législatives de 2024. Le Décret n° 2024-1982 du 13 septembre 2024 portant répartition des sièges de députés à élire au scrutin majoritaire départemental pour les élections législatives anticipées du 17 novembre 2024 stipule le maintien de la même répartition des sièges que celle retenue pour les dernières élections législatives de 2022. Par voie de conséquence, une répartition de sièges qui non seulement est inégalitaire, mais en sus, elle ne tient pas compte de l’accroissement de la population est utilisée. Une telle décision indique qu’en sus des limites de l’article L.151 sur la méthode à utiliser, des données démographiques périmées sont la base statistique de répartition des sièges de députés à élire au scrutin majoritaire départemental des législatives de 2024. L’évolution démographique aurait dû conduire à une nouvelle répartition des sièges pour atténuer la répartition disproportionnelle des législatives de 2022. Dans cette perspective, le département de Mbacké, étant le plus peuple du Sénégal, obtiendrait le plafond de sept (7) députés plutôt que Dakar dont la population a baissé. Le département de Goudiry avec une population de 170 816 habitants, atteignant ainsi le quotient national, disposerait de deux (2) députés plutôt que d’un (1). Celui de Rufisque passant de 592 630 à 822 105 habitants bénéficierait de quatre (4) députés à l'instar de Thiès, 880 266 habitants, plutôt que de deux (2). Comment justifier que le département de Pikine avec une population de 758 554 habitants puisse avoir 5 députés pendant que Rufisque avec 822 105 habitants et Keur Massar 759 849, n'en compte que deux (2). En outre, on ne peut pas expliquer que des départements parmi les plus peuplés, tels que Rufisque (822 105), Keur Massar (759 849), Kaolack (665 008), Tivaouane (650 067), Nioro du Rip (513 181), Podor (487 220), Louga (477 887) puissent avoir le même nombre de deux (2) députés que les départements les moins peuplés : Medina Yoro Foula (185 575), Goudomp (188 537), Sedhiou (193 867), Bakel (190 501), Koumpentoum (199 457). Enfin, ces écarts de représentations sont encore plus importants entre Sénégalais vivant dans le territoire national et ceux vivant à l’étranger. Comment expliquer que les départements de l’Afrique australe, de l’Asie et Moyen Orient avec un nombre d’électeurs respectifs de 3 379 et 3 615 peuvent chacun élire un (1) député pendant qu’une partie de la population des départements de Keur Massar au nombre de 589 849 et de Kaolack de 495 008 ne peuvent pas élire un (1) député. De même, comment justifier que 652 105 habitants de Rufisque et 480 067 de Tivaouane ne peuvent pas élire un (1) député alors que 30 909 électeurs du département d'Afrique du centre et 23 054 d'Amérique Océanie peuvent le faire. Il découle ainsi de l’analyse que les écarts de représentativité observés aux législatives de 2022 sont creusés. D’abord, par la non prise en compte de la croissance démographique des départements, et ensuite par la différence de base de répartition des sièges entre les départements du territoire national et ceux de l’extérieur. Ces déséquilibres importants de la répartition des sièges entre départements produisent ensuite des écarts d’influence d’un électeur à l’autre, autrement dit, des inégalités de suffrage. Par conséquent, des atteintes au respect de l’égalité de représentativité. La règle de la représentation minimale de deux députés pour tout département ayant 170 000 habitants et le recours aux électeurs pour repartir les sièges à l’étranger sont inconstitutionnels car ayant des effets qui dérogent au principe d’égalité de suffrage consacré par l’article 3 de la Constitution. Aux termes de l'article 1er de la Constitution, la République du Sénégal « assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens, sans distinction d’origine, de race, de sexe, de religion. ». Que l'article 3 de la Constitution dispose, dans son premier alinéa, que « la souveraineté nationale appartient au peuple sénégalais qui l'exerce par ses représentants et par la voie du référendum » et, dans son troisième alinéa, que « Le suffrage peut être direct ou indirect. Il est toujours universel, égal et secret. ». Que, selon le troisième alinéa de l'article 59 de la Constitution, « Les députés sont élus au suffrage universel direct. ». Qu'il résulte donc de ces dispositions que les députés de l'Assemblée nationale élus au suffrage universel direct, doivent l’être sur des bases essentiellement démographiques selon une répartition des sièges de députés respectant autant que possible l'égalité devant le suffrage car l’égalité parfaite est impossible à atteindre. Attendu que le deuxième alinéa de l'article L.151 du code électoral dispose que «Les départements dont la population est égale ou supérieure à 170.000 habitants obtiennent au moins deux (2) sièges. ». Que l’emploi de cette règle produit d’importants déséquilibres dans la répartition des sièges entre départements entraînant ensuite des écarts d’influence d’un électeur à l’autre, autrement dit, des inégalités de suffrage. Qu'il s'ensuit que les dispositions précitées sont contraires à la Constitution. Attendu que le 1er alinéa de l'article L.151 du code électoral dispose que « Le nombre de députés à élire dans chaque département est déterminé par décret en tenant compte de l’importance démographique respective de chaque département. » ; et, dans son troisième alinéa, que « Le nombre de députés à élire dans chaque département de l’extérieur du pays est déterminé par décret en tenant compte de l’importance de l’électorat de chaque département. ». Que ces dispositions, qui permettent de déterminer, de manière différente selon les circonscriptions, les bases démographiques à partir desquelles sont répartis les sièges de députés, méconnaît le principe d'égalité devant le suffrage. Qu'il s'ensuit que ces dispositions sont à considérer comme contraires à la Constitution. A la lumière de tout ce qui précède, le Conseil Constitutionnel est à saisir d’une requête pour contester la conformité à la constitution des dispositions précitées de l’article L.151 du Code électoral. Une vérification de la loi par rapport aux critères constitutionnels s’impose afin que soit intégralement censuré le décret n° 2024-1982 du 13 septembre 2024 portant répartition des sièges de députés à élire au scrutin majoritaire départemental pour les élections législatives anticipées du 17 novembre, qui n'a pas assuré au mieux l'égalité devant le suffrage dans la répartition des sièges entre les départements. Légiférer sur une nouvelle méthode de découpage ou redécoupage électoral qui ne soit pas infectée de logiques partisanes, à des fins électoralistes, s’avère ainsi indispensable. Plus de « Gerrymandering » et plus de « Malapportionment » dans la carte électorale afin d’augmenter les conditions de victoire. In fine, plus de carte électorale réalisée en l’absence de toute règle et contrôle constitutionnel. Malgré le constat, au sortir de l’élection présidentielle du 24 mars 2024, d’un processus électoral biaisé qui prive de vote des millions d’électeurs Sénégalais, et d’un système électorale inéquitable qui crée des majorités fictives (non conforme à la réalité), il n’a pas été observé l’amorce d’une quelconque dynamique de réformes électorales en vue des législatives du 17 novembre 2024. En effet, le dialogue promis par le Président nouvellement élu pour examiner les reformes électorales à implémenter, n’a pas encore été convoqué, plus de 6 mois après ce premier discours à la nation, qui laissait penser que la consolidation de la démocratie serait un axe prioritaire de sa gouvernance. Plutôt que de s’engager, conformément à sa promesse du 3 avril 2024, dans un dialogue inclusif pour des reformes électorales qui garantissent que la voix de chaque électeur Sénégalais compte dans le choix des représentants du peuple, nous libérant ainsi d’élections au suffrage censitaire, le nouveau Président s’est plutôt attelé avec célérité à organiser des législatives huit (8) après la présidentielle de mars 2024. À cet égard, il déclare inviter le Peuple détenteur de la souveraineté à s’exprimer, conformément aux dispositions de l’article 3 de la Constitution, pour lui demander les moyens institutionnels de gouverner. Se pose alors la question de savoir si les conditions qui permettent au peuple de s’exprimer ont été créées par des reformes qui tendent à rendre les élections plus démocratiques, suite à l’évaluation du processus électoral et du système électoral du scrutin du 24 mars 2024. Au-delà des justificatifs avancés pour dissoudre l’Assemblée Nationale, la véritable motivation est de profiter des effets des scrutins de proximité, c’est à dire, de l’agencement temporel, planifié et décidé, entre l’élection présidentielle et les élections législatives, qui produit des effets d’entraînement notoires de la présidentielle sur le scrutin législatif. En effet, les scrutins de proximité et le scrutin majoritaire à un tour ont toujours accouché systématiquement d’une large majorité parlementaire au Sénégal, et que les effets de l’introduction d’une portion congrue de proportionnelle sont minimes et sans effets. Sous cet angle, le nouveau président tirera avantage du scrutin de proximité, mais aussi, de la position qu’il occupe dans l’espace politique, faisant figure de « vainqueur de Condorcet », pour obtenir, dans quelques semaines, une large majorité parlementaire. Il apparait déjà dans une estimation des résultats des législatives du 17 novembre 2024 que la coalition politique au pouvoir, sur la base des résultats par département de l’élection présidentielle du 24 mars 2024 obtiendrait une majorité absolue à l’Assemblée nationale avec 105 députés. Il est à noter que c’est un exercice toujours fragile, qui incite à la prudence quant aux projections de résultats annoncés. Des élections législatives anticipées sont donc organisées, 8 mois après la présidentielle de 2024, sans aucune réforme du cadre légal et institutionnel, ni du système électoral, ni du processus électoral. La gouvernance des élections en vigueur depuis les législatives de 2007 est maintenue tel quel. Le scrutin du 17 novembre 2024 sera ainsi marqué par l’exclusion du vote d’au moins cinq millions d’électeurs, des députés élus par une minorité d’électeurs qui ne peuvent prétendre à la légitimité démocratique et enfin par une répartition des sièges de députés déséquilibrée produisant des inégalités de suffrages contraires à la Constitution. La répartition des sièges qui résulte du décret n° 2022-1051 du 03 mai 2022 portant répartition des sièges de députés à élire au scrutin majoritaire départemental pour les élections législatives du 31 juillet 2022 qui porte atteinte à l’égalité de suffrage est conservé intact, sans aucune modification, pour les législatives de 2024. Le Décret n° 2024-1982 du 13 septembre 2024 portant répartition des sièges de députés à élire au scrutin majoritaire départemental pour les élections législatives anticipées du 17 novembre 2024 stipule le maintien de la même répartition des sièges que celle retenue pour les dernières élections législatives de 2022. Par voie de conséquence, une répartition de sièges qui non seulement est inégalitaire, mais en sus, elle ne tient pas compte de l’accroissement de la population est utilisée. Une telle décision indique qu’en sus des limites de l’article L.151 sur la méthode à utiliser, des données démographiques périmées sont la base statistique de répartition des sièges de députés à élire au scrutin majoritaire départemental des législatives de 2024. L’évolution démographique aurait dû conduire à une nouvelle répartition des sièges pour atténuer la répartition disproportionnelle des législatives de 2022. Dans cette perspective, le département de Mbacké, étant le plus peuple du Sénégal, obtiendrait le plafond de sept (7) députés plutôt que Dakar dont la population a baissé. Le département de Goudiry avec une population de 170 816 habitants, atteignant ainsi le quotient national, disposerait de deux (2) députés plutôt que d’un (1). Celui de Rufisque passant de 592 630 à 822 105 habitants bénéficierait de quatre (4) députés à l'instar de Thiès, 880 266 habitants, plutôt que de deux (2). Comment justifier que le département de Pikine avec une population de 758 554 habitants puisse avoir 5 députés pendant que Rufisque avec 822 105 habitants et Keur Massar 759 849, n'en compte que deux (2). En outre, on ne peut pas expliquer que des départements parmi les plus peuplés, tels que Rufisque (822 105), Keur Massar (759 849), Kaolack (665 008), Tivaouane (650 067), Nioro du Rip (513 181), Podor (487 220), Louga (477 887) puissent avoir le même nombre de deux (2) députés que les départements les moins peuplés : Medina Yoro Foula (185 575), Goudomp (188 537), Sedhiou (193 867), Bakel (190 501), Koumpentoum (199 457). Enfin, ces écarts de représentations sont encore plus importants entre Sénégalais vivant dans le territoire national et ceux vivant à l’étranger. Comment expliquer que les départements de l’Afrique australe, de l’Asie et Moyen Orient avec un nombre d’électeurs respectifs de 3 379 et 3 615 peuvent chacun élire un (1) député pendant qu’une partie de la population des départements de Keur Massar au nombre de 589 849 et de Kaolack de 495 008 ne peuvent pas élire un (1) député. De même, comment justifier que 652 105 habitants de Rufisque et 480 067 de Tivaouane ne peuvent pas élire un (1) député alors que 30 909 électeurs du département d'Afrique du centre et 23 054 d'Amérique Océanie peuvent le faire. Il découle ainsi de l’analyse que les écarts de représentativité observés aux législatives de 2022 sont creusés. D’abord, par la non prise en compte de la croissance démographique des départements, et ensuite par la différence de base de répartition des sièges entre les départements du territoire national et ceux de l’extérieur. Ces déséquilibres importants de la répartition des sièges entre départements produisent ensuite des écarts d’influence d’un électeur à l’autre, autrement dit, des inégalités de suffrage. Par conséquent, des atteintes au respect de l’égalité de représentativité. La règle de la représentation minimale de deux députés pour tout département ayant 170 000 habitants et le recours aux électeurs pour repartir les sièges à l’étranger sont inconstitutionnels car ayant des effets qui dérogent au principe d’égalité de suffrage consacré par l’article 3 de la Constitution. Aux termes de l'article 1er de la Constitution, la République du Sénégal « assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens, sans distinction d’origine, de race, de sexe, de religion. ». Que l'article 3 de la Constitution dispose, dans son premier alinéa, que « la souveraineté nationale appartient au peuple sénégalais qui l'exerce par ses représentants et par la voie du référendum » et, dans son troisième alinéa, que « Le suffrage peut être direct ou indirect. Il est toujours universel, égal et secret. ». Que, selon le troisième alinéa de l'article 59 de la Constitution, « Les députés sont élus au suffrage universel direct. ». Qu'il résulte donc de ces dispositions que les députés de l'Assemblée nationale élus au suffrage universel direct, doivent l’être sur des bases essentiellement démographiques selon une répartition des sièges de députés respectant autant que possible l'égalité devant le suffrage car l’égalité parfaite est impossible à atteindre. Attendu que le deuxième alinéa de l'article L.151 du code électoral dispose que «Les départements dont la population est égale ou supérieure à 170.000 habitants obtiennent au moins deux (2) sièges. ». Que l’emploi de cette règle produit d’importants déséquilibres dans la répartition des sièges entre départements entraînant ensuite des écarts d’influence d’un électeur à l’autre, autrement dit, des inégalités de suffrage. Qu'il s'ensuit que les dispositions précitées sont contraires à la Constitution. Attendu que le 1er alinéa de l'article L.151 du code électoral dispose que « Le nombre de députés à élire dans chaque département est déterminé par décret en tenant compte de l’importance démographique respective de chaque département. » ; et, dans son troisième alinéa, que « Le nombre de députés à élire dans chaque département de l’extérieur du pays est déterminé par décret en tenant compte de l’importance de l’électorat de chaque département. ». Que ces dispositions, qui permettent de déterminer, de manière différente selon les circonscriptions, les bases démographiques à partir desquelles sont répartis les sièges de députés, méconnaît le principe d'égalité devant le suffrage. Qu'il s'ensuit que ces dispositions sont à considérer comme contraires à la Constitution. A la lumière de tout ce qui précède, le Conseil Constitutionnel est à saisir d’une requête pour contester la conformité à la constitution des dispositions précitées de l’article L.151 du Code électoral. Une vérification de la loi par rapport aux critères constitutionnels s’impose afin que soit intégralement censuré le décret n° 2024-1982 du 13 septembre 2024 portant répartition des sièges de députés à élire au scrutin majoritaire départemental pour les élections législatives anticipées du 17 novembre, qui n'a pas assuré au mieux l'égalité devant le suffrage dans la répartition des sièges entre les départements. Légiférer sur une nouvelle méthode de découpage ou redécoupage électoral qui ne soit pas infectée de logiques partisanes, à des fins électoralistes, s’avère ainsi indispensable. Plus de « Gerrymandering » et plus de « Malapportionment » dans la carte électorale afin d’augmenter les conditions de victoire. In fine, plus de carte électorale réalisée en l’absence de toute règle et contrôle constitutionnel. Publié le 17/10/ 2024 |
Malgré le constat, au sortir de l’élection présidentielle du 24 mars 2024, d’un processus électoral biaisé qui prive de vote des millions d’électeurs Sénégalais, et d’un système électorale inéquitable qui crée des majorités fictives (non conforme à la réalité), il n’a pas été observé l’amorce d’une quelconque dynamique de réformes électorales en vue des législatives du 17 novembre 2024. En effet, le dialogue promis par le Président nouvellement élu pour examiner les reformes électorales à implémenter, n’a pas encore été convoqué, plus de 6 mois après ce premier discours à la nation, qui laissait penser que la consolidation de la démocratie serait un axe prioritaire de sa gouvernance. Plutôt que de s’engager, conformément à sa promesse du 3 avril 2024, dans un dialogue inclusif pour des reformes électorales qui garantissent que la voix de chaque électeur Sénégalais compte dans le choix des représentants du peuple, nous libérant ainsi d’élections au suffrage censitaire, le nouveau Président s’est plutôt attelé avec célérité à organiser des législatives huit (8) après la présidentielle de mars 2024. À cet égard, il déclare inviter le Peuple détenteur de la souveraineté à s’exprimer, conformément aux dispositions de l’article 3 de la Constitution, pour lui demander les moyens institutionnels de gouverner. Se pose alors la question de savoir si les conditions qui permettent au peuple de s’exprimer ont été créées par des reformes qui tendent à rendre les élections plus démocratiques, suite à l’évaluation du processus électoral et du système électoral du scrutin du 24 mars 2024. Au-delà des justificatifs avancés pour dissoudre l’Assemblée Nationale, la véritable motivation est de profiter des effets des scrutins de proximité, c’est à dire, de l’agencement temporel, planifié et décidé, entre l’élection présidentielle et les élections législatives, qui produit des effets d’entraînement notoires de la présidentielle sur le scrutin législatif. En effet, les scrutins de proximité et le scrutin majoritaire à un tour ont toujours accouché systématiquement d’une large majorité parlementaire au Sénégal, et que les effets de l’introduction d’une portion congrue de proportionnelle sont minimes et sans effets. Sous cet angle, le nouveau président tirera avantage du scrutin de proximité, mais aussi, de la position qu’il occupe dans l’espace politique, faisant figure de « vainqueur de Condorcet », pour obtenir, dans quelques semaines, une large majorité parlementaire. Il apparait déjà dans une estimation des résultats des législatives du 17 novembre 2024 que la coalition politique au pouvoir, sur la base des résultats par département de l’élection présidentielle du 24 mars 2024 obtiendrait une majorité absolue à l’Assemblée nationale avec 105 députés. Il est à noter que c’est un exercice toujours fragile, qui incite à la prudence quant aux projections de résultats annoncés. Des élections législatives anticipées sont donc organisées, 8 mois après la présidentielle de 2024, sans aucune réforme du cadre légal et institutionnel, ni du système électoral, ni du processus électoral. La gouvernance des élections en vigueur depuis les législatives de 2007 est maintenue tel quel. Le scrutin du 17 novembre 2024 sera ainsi marqué par l’exclusion du vote d’au moins cinq millions d’électeurs, des députés élus par une minorité d’électeurs qui ne peuvent prétendre à la légitimité démocratique et enfin par une répartition des sièges de députés déséquilibrée produisant des inégalités de suffrages contraires à la Constitution. La répartition des sièges qui résulte du décret n° 2022-1051 du 03 mai 2022 portant répartition des sièges de députés à élire au scrutin majoritaire départemental pour les élections législatives du 31 juillet 2022 qui porte atteinte à l’égalité de suffrage est conservé intact, sans aucune modification, pour les législatives de 2024. Le Décret n° 2024-1982 du 13 septembre 2024 portant répartition des sièges de députés à élire au scrutin majoritaire départemental pour les élections législatives anticipées du 17 novembre 2024 stipule le maintien de la même répartition des sièges que celle retenue pour les dernières élections législatives de 2022. Par voie de conséquence, une répartition de sièges qui non seulement est inégalitaire, mais en sus, elle ne tient pas compte de l’accroissement de la population est utilisée. Une telle décision indique qu’en sus des limites de l’article L.151 sur la méthode à utiliser, des données démographiques périmées sont la base statistique de répartition des sièges de députés à élire au scrutin majoritaire départemental des législatives de 2024. L’évolution démographique aurait dû conduire à une nouvelle répartition des sièges pour atténuer la répartition disproportionnelle des législatives de 2022. Dans cette perspective, le département de Mbacké, étant le plus peuple du Sénégal, obtiendrait le plafond de sept (7) députés plutôt que Dakar dont la population a baissé. Le département de Goudiry avec une population de 170 816 habitants, atteignant ainsi le quotient national, disposerait de deux (2) députés plutôt que d’un (1). Celui de Rufisque passant de 592 630 à 822 105 habitants bénéficierait de quatre (4) députés à l'instar de Thiès, 880 266 habitants, plutôt que de deux (2). Comment justifier que le département de Pikine avec une population de 758 554 habitants puisse avoir 5 députés pendant que Rufisque avec 822 105 habitants et Keur Massar 759 849, n'en compte que deux (2). En outre, on ne peut pas expliquer que des départements parmi les plus peuplés, tels que Rufisque (822 105), Keur Massar (759 849), Kaolack (665 008), Tivaouane (650 067), Nioro du Rip (513 181), Podor (487 220), Louga (477 887) puissent avoir le même nombre de deux (2) députés que les départements les moins peuplés : Medina Yoro Foula (185 575), Goudomp (188 537), Sedhiou (193 867), Bakel (190 501), Koumpentoum (199 457). Enfin, ces écarts de représentations sont encore plus importants entre Sénégalais vivant dans le territoire national et ceux vivant à l’étranger. Comment expliquer que les départements de l’Afrique australe, de l’Asie et Moyen Orient avec un nombre d’électeurs respectifs de 3 379 et 3 615 peuvent chacun élire un (1) député pendant qu’une partie de la population des départements de Keur Massar au nombre de 589 849 et de Kaolack de 495 008 ne peuvent pas élire un (1) député. De même, comment justifier que 652 105 habitants de Rufisque et 480 067 de Tivaouane ne peuvent pas élire un (1) député alors que 30 909 électeurs du département d'Afrique du centre et 23 054 d'Amérique Océanie peuvent le faire. Il découle ainsi de l’analyse que les écarts de représentativité observés aux législatives de 2022 sont creusés. D’abord, par la non prise en compte de la croissance démographique des départements, et ensuite par la différence de base de répartition des sièges entre les départements du territoire national et ceux de l’extérieur. Ces déséquilibres importants de la répartition des sièges entre départements produisent ensuite des écarts d’influence d’un électeur à l’autre, autrement dit, des inégalités de suffrage. Par conséquent, des atteintes au respect de l’égalité de représentativité. La règle de la représentation minimale de deux députés pour tout département ayant 170 000 habitants et le recours aux électeurs pour repartir les sièges à l’étranger sont inconstitutionnels car ayant des effets qui dérogent au principe d’égalité de suffrage consacré par l’article 3 de la Constitution. Aux termes de l'article 1er de la Constitution, la République du Sénégal « assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens, sans distinction d’origine, de race, de sexe, de religion. ». Que l'article 3 de la Constitution dispose, dans son premier alinéa, que « la souveraineté nationale appartient au peuple sénégalais qui l'exerce par ses représentants et par la voie du référendum » et, dans son troisième alinéa, que « Le suffrage peut être direct ou indirect. Il est toujours universel, égal et secret. ». Que, selon le troisième alinéa de l'article 59 de la Constitution, « Les députés sont élus au suffrage universel direct. ». Qu'il résulte donc de ces dispositions que les députés de l'Assemblée nationale élus au suffrage universel direct, doivent l’être sur des bases essentiellement démographiques selon une répartition des sièges de députés respectant autant que possible l'égalité devant le suffrage car l’égalité parfaite est impossible à atteindre. Attendu que le deuxième alinéa de l'article L.151 du code électoral dispose que «Les départements dont la population est égale ou supérieure à 170.000 habitants obtiennent au moins deux (2) sièges. ». Que l’emploi de cette règle produit d’importants déséquilibres dans la répartition des sièges entre départements entraînant ensuite des écarts d’influence d’un électeur à l’autre, autrement dit, des inégalités de suffrage. Qu'il s'ensuit que les dispositions précitées sont contraires à la Constitution. Attendu que le 1er alinéa de l'article L.151 du code électoral dispose que « Le nombre de députés à élire dans chaque département est déterminé par décret en tenant compte de l’importance démographique respective de chaque département. » ; et, dans son troisième alinéa, que « Le nombre de députés à élire dans chaque département de l’extérieur du pays est déterminé par décret en tenant compte de l’importance de l’électorat de chaque département. ». Que ces dispositions, qui permettent de déterminer, de manière différente selon les circonscriptions, les bases démographiques à partir desquelles sont répartis les sièges de députés, méconnaît le principe d'égalité devant le suffrage. Qu'il s'ensuit que ces dispositions sont à considérer comme contraires à la Constitution. A la lumière de tout ce qui précède, le Conseil Constitutionnel est à saisir d’une requête pour contester la conformité à la constitution des dispositions précitées de l’article L.151 du Code électoral. Une vérification de la loi par rapport aux critères constitutionnels s’impose afin que soit intégralement censuré le décret n° 2024-1982 du 13 septembre 2024 portant répartition des sièges de députés à élire au scrutin majoritaire départemental pour les élections législatives anticipées du 17 novembre, qui n'a pas assuré au mieux l'égalité devant le suffrage dans la répartition des sièges entre les départements. Légiférer sur une nouvelle méthode de découpage ou redécoupage électoral qui ne soit pas infectée de logiques partisanes, à des fins électoralistes, s’avère ainsi indispensable. Plus de « Gerrymandering » et plus de « Malapportionment » dans la carte électorale afin d’augmenter les conditions de victoire. In fine, plus de carte électorale réalisée en l’absence de toute règle et contrôle constitutionnel. Malgré le constat, au sortir de l’élection présidentielle du 24 mars 2024, d’un processus électoral biaisé qui prive de vote des millions d’électeurs Sénégalais, et d’un système électorale inéquitable qui crée des majorités fictives (non conforme à la réalité), il n’a pas été observé l’amorce d’une quelconque dynamique de réformes électorales en vue des législatives du 17 novembre 2024. En effet, le dialogue promis par le Président nouvellement élu pour examiner les reformes électorales à implémenter, n’a pas encore été convoqué, plus de 6 mois après ce premier discours à la nation, qui laissait penser que la consolidation de la démocratie serait un axe prioritaire de sa gouvernance. Plutôt que de s’engager, conformément à sa promesse du 3 avril 2024, dans un dialogue inclusif pour des reformes électorales qui garantissent que la voix de chaque électeur Sénégalais compte dans le choix des représentants du peuple, nous libérant ainsi d’élections au suffrage censitaire, le nouveau Président s’est plutôt attelé avec célérité à organiser des législatives huit (8) après la présidentielle de mars 2024. À cet égard, il déclare inviter le Peuple détenteur de la souveraineté à s’exprimer, conformément aux dispositions de l’article 3 de la Constitution, pour lui demander les moyens institutionnels de gouverner. Se pose alors la question de savoir si les conditions qui permettent au peuple de s’exprimer ont été créées par des reformes qui tendent à rendre les élections plus démocratiques, suite à l’évaluation du processus électoral et du système électoral du scrutin du 24 mars 2024. Au-delà des justificatifs avancés pour dissoudre l’Assemblée Nationale, la véritable motivation est de profiter des effets des scrutins de proximité, c’est à dire, de l’agencement temporel, planifié et décidé, entre l’élection présidentielle et les élections législatives, qui produit des effets d’entraînement notoires de la présidentielle sur le scrutin législatif. En effet, les scrutins de proximité et le scrutin majoritaire à un tour ont toujours accouché systématiquement d’une large majorité parlementaire au Sénégal, et que les effets de l’introduction d’une portion congrue de proportionnelle sont minimes et sans effets. Sous cet angle, le nouveau président tirera avantage du scrutin de proximité, mais aussi, de la position qu’il occupe dans l’espace politique, faisant figure de « vainqueur de Condorcet », pour obtenir, dans quelques semaines, une large majorité parlementaire. Il apparait déjà dans une estimation des résultats des législatives du 17 novembre 2024 que la coalition politique au pouvoir, sur la base des résultats par département de l’élection présidentielle du 24 mars 2024 obtiendrait une majorité absolue à l’Assemblée nationale avec 105 députés. Il est à noter que c’est un exercice toujours fragile, qui incite à la prudence quant aux projections de résultats annoncés. Des élections législatives anticipées sont donc organisées, 8 mois après la présidentielle de 2024, sans aucune réforme du cadre légal et institutionnel, ni du système électoral, ni du processus électoral. La gouvernance des élections en vigueur depuis les législatives de 2007 est maintenue tel quel. Le scrutin du 17 novembre 2024 sera ainsi marqué par l’exclusion du vote d’au moins cinq millions d’électeurs, des députés élus par une minorité d’électeurs qui ne peuvent prétendre à la légitimité démocratique et enfin par une répartition des sièges de députés déséquilibrée produisant des inégalités de suffrages contraires à la Constitution. La répartition des sièges qui résulte du décret n° 2022-1051 du 03 mai 2022 portant répartition des sièges de députés à élire au scrutin majoritaire départemental pour les élections législatives du 31 juillet 2022 qui porte atteinte à l’égalité de suffrage est conservé intact, sans aucune modification, pour les législatives de 2024. Le Décret n° 2024-1982 du 13 septembre 2024 portant répartition des sièges de députés à élire au scrutin majoritaire départemental pour les élections législatives anticipées du 17 novembre 2024 stipule le maintien de la même répartition des sièges que celle retenue pour les dernières élections législatives de 2022. Par voie de conséquence, une répartition de sièges qui non seulement est inégalitaire, mais en sus, elle ne tient pas compte de l’accroissement de la population est utilisée. Une telle décision indique qu’en sus des limites de l’article L.151 sur la méthode à utiliser, des données démographiques périmées sont la base statistique de répartition des sièges de députés à élire au scrutin majoritaire départemental des législatives de 2024. L’évolution démographique aurait dû conduire à une nouvelle répartition des sièges pour atténuer la répartition disproportionnelle des législatives de 2022. Dans cette perspective, le département de Mbacké, étant le plus peuple du Sénégal, obtiendrait le plafond de sept (7) députés plutôt que Dakar dont la population a baissé. Le département de Goudiry avec une population de 170 816 habitants, atteignant ainsi le quotient national, disposerait de deux (2) députés plutôt que d’un (1). Celui de Rufisque passant de 592 630 à 822 105 habitants bénéficierait de quatre (4) députés à l'instar de Thiès, 880 266 habitants, plutôt que de deux (2). Comment justifier que le département de Pikine avec une population de 758 554 habitants puisse avoir 5 députés pendant que Rufisque avec 822 105 habitants et Keur Massar 759 849, n'en compte que deux (2). En outre, on ne peut pas expliquer que des départements parmi les plus peuplés, tels que Rufisque (822 105), Keur Massar (759 849), Kaolack (665 008), Tivaouane (650 067), Nioro du Rip (513 181), Podor (487 220), Louga (477 887) puissent avoir le même nombre de deux (2) députés que les départements les moins peuplés : Medina Yoro Foula (185 575), Goudomp (188 537), Sedhiou (193 867), Bakel (190 501), Koumpentoum (199 457). Enfin, ces écarts de représentations sont encore plus importants entre Sénégalais vivant dans le territoire national et ceux vivant à l’étranger. Comment expliquer que les départements de l’Afrique australe, de l’Asie et Moyen Orient avec un nombre d’électeurs respectifs de 3 379 et 3 615 peuvent chacun élire un (1) député pendant qu’une partie de la population des départements de Keur Massar au nombre de 589 849 et de Kaolack de 495 008 ne peuvent pas élire un (1) député. De même, comment justifier que 652 105 habitants de Rufisque et 480 067 de Tivaouane ne peuvent pas élire un (1) député alors que 30 909 électeurs du département d'Afrique du centre et 23 054 d'Amérique Océanie peuvent le faire. Il découle ainsi de l’analyse que les écarts de représentativité observés aux législatives de 2022 sont creusés. D’abord, par la non prise en compte de la croissance démographique des départements, et ensuite par la différence de base de répartition des sièges entre les départements du territoire national et ceux de l’extérieur. Ces déséquilibres importants de la répartition des sièges entre départements produisent ensuite des écarts d’influence d’un électeur à l’autre, autrement dit, des inégalités de suffrage. Par conséquent, des atteintes au respect de l’égalité de représentativité. La règle de la représentation minimale de deux députés pour tout département ayant 170 000 habitants et le recours aux électeurs pour repartir les sièges à l’étranger sont inconstitutionnels car ayant des effets qui dérogent au principe d’égalité de suffrage consacré par l’article 3 de la Constitution. Aux termes de l'article 1er de la Constitution, la République du Sénégal « assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens, sans distinction d’origine, de race, de sexe, de religion. ». Que l'article 3 de la Constitution dispose, dans son premier alinéa, que « la souveraineté nationale appartient au peuple sénégalais qui l'exerce par ses représentants et par la voie du référendum » et, dans son troisième alinéa, que « Le suffrage peut être direct ou indirect. Il est toujours universel, égal et secret. ». Que, selon le troisième alinéa de l'article 59 de la Constitution, « Les députés sont élus au suffrage universel direct. ». Qu'il résulte donc de ces dispositions que les députés de l'Assemblée nationale élus au suffrage universel direct, doivent l’être sur des bases essentiellement démographiques selon une répartition des sièges de députés respectant autant que possible l'égalité devant le suffrage car l’égalité parfaite est impossible à atteindre. Attendu que le deuxième alinéa de l'article L.151 du code électoral dispose que «Les départements dont la population est égale ou supérieure à 170.000 habitants obtiennent au moins deux (2) sièges. ». Que l’emploi de cette règle produit d’importants déséquilibres dans la répartition des sièges entre départements entraînant ensuite des écarts d’influence d’un électeur à l’autre, autrement dit, des inégalités de suffrage. Qu'il s'ensuit que les dispositions précitées sont contraires à la Constitution. Attendu que le 1er alinéa de l'article L.151 du code électoral dispose que « Le nombre de députés à élire dans chaque département est déterminé par décret en tenant compte de l’importance démographique respective de chaque département. » ; et, dans son troisième alinéa, que « Le nombre de députés à élire dans chaque département de l’extérieur du pays est déterminé par décret en tenant compte de l’importance de l’électorat de chaque département. ». Que ces dispositions, qui permettent de déterminer, de manière différente selon les circonscriptions, les bases démographiques à partir desquelles sont répartis les sièges de députés, méconnaît le principe d'égalité devant le suffrage. Qu'il s'ensuit que ces dispositions sont à considérer comme contraires à la Constitution. A la lumière de tout ce qui précède, le Conseil Constitutionnel est à saisir d’une requête pour contester la conformité à la constitution des dispositions précitées de l’article L.151 du Code électoral. Une vérification de la loi par rapport aux critères constitutionnels s’impose afin que soit intégralement censuré le décret n° 2024-1982 du 13 septembre 2024 portant répartition des sièges de députés à élire au scrutin majoritaire départemental pour les élections législatives anticipées du 17 novembre, qui n'a pas assuré au mieux l'égalité devant le suffrage dans la répartition des sièges entre les départements. Légiférer sur une nouvelle méthode de découpage ou redécoupage électoral qui ne soit pas infectée de logiques partisanes, à des fins électoralistes, s’avère ainsi indispensable. Plus de « Gerrymandering » et plus de « Malapportionment » dans la carte électorale afin d’augmenter les conditions de victoire. In fine, plus de carte électorale réalisée en l’absence de toute règle et contrôle constitutionnel. Publié le 17/10/ 2024 |
|